Aujourd'hui j'ai envie de partager ma dernière lecture. Il s'agit d'un livre de Ayaan Hirsi Ali (l'auteur du scénario du film Submission, qui a coûté la vie au cinéaste Théo Van Gogh, le 2 novembre 2004, dans une rue d'Amsterdam) Insoumise.
Pour comprendre le livre en question, son but, sa portée un bref aperçu biographique s'impose.
Ayaan Hirsi Ali est née en Somalie en 1969, dans une famille de tradition islamiste intégriste. Pour fuir un mariage forcé, elle s'est réfugiée aux Pays Bas où elle a d'abord travaillé comme femme de ménage puis comme traductrice dans les services sociaux, tout en étudiant à l'université.
Aujourd'hui, députée du parti libéral, elle est une figure majeure de la vie politique néerlandaise.
Dans son livre, Hirsi Ali dresse un bilan alarmant de la société musulmane : Les femmes, qui ne sont point l'égales des hommes, ont une fonction purement reproductive.
Les familles musulmanes cultivent une obsession maladive de la virginité, ce qui les pousse à pratiquer des excisions, à répudier leurs filles et parfois à les tuer.
Les hommes quant à eux, sont tantôt décrits comme les victimes de l'éducation de mères analphabètes et (donc) croyantes, tantôt comme des pervers conscients de l'injustice mais appliquant à la lettre les consignes d'Allah.
Les démocraties européennes, seule force capable de faire changer les choses, en prétextant la tolérance demeurent sans réaction face à cette religion arriérée. "Ne nous abandonnez pas. Ne nous empêchez pas d'avoir un Voltaire! , supplie-t-elle, la culture musulmane a besoin de connaître son siècle des Lumières."
J'ai rarement été aussi déçue par une lecture. Premièrement, Ayaan confond gravement culture et religion. Elle accuse l'islam d'être à l'origine du retard scientifique,économique et politique de certains pays alors qu'en fait, il est clair que c'est ledit retard qui est à l'origine de l'obscurantisme dans lequel ont basculé ces pays. Deuxièmement, elle juge l'islam à travers sa propre histoire. Elle le haie parce qu'on l'a excisée, endoctrinée, obligée à porter le voile, forcée à se marier avec un inconnu. Troisièmement, elle avance des arguments erronés, ridiculement diffamatoires. Comme quand elle a nié l'existence de penseurs musulmans défendant l'islam ,libres et courageux. Que fait-elle d'Abdul karim Souroush, de Mohammed Arkoun, Fazlur Rahman, Amin al-Khûli et Muhammad Khalafallâh (cf. Les nouveaux penseurs de l'islam de Rachid Benzine pour plus de détails sur leurs combats respectifs), pour ne citer que ceux-là ? Ne valent-ils pas tous leurs confrères occidentaux? Il est vrai que, minoritaires dans leurs pays, menacés de mort et contraints à l'exil, l'écho de leurs voix arrive difficilement à se faire entendre, mais ça n'empêche pas qu'ils sont bien là. Leurs travaux sont loin de mériter un reniement pur et simple.
Bref, tout cela pour dire qu'en ouvrant le livre d'Ayaan Hisri Ali, je m'attendais à un niveau supérieur d'argumentations, et à moins de diffamations. Si son but est de sauver les filles et les femmes de sa communauté des griffes de l'obscurantisme et de l'ignorance, en continuant sur la voie périlleuse de la provocation, elle ne réussira qu'à s'attirer leur haine et leur rejet. Ce n'est vraiment pas la meilleure façon de les aborder...